April 10, 2008

Just like a hurricane


C'était hier, ou avant hier. Je faisais mon service au sein d'Amnesty International. pas entièrement par conviction, non : pendant un temps, l'armée m'avait fait miroiter un poste d'interprète aux Nations Unies et j'y serais allé de bon coeur (moi et NY, c'est comme une vieille histoire un peu lassante). Une fois cette possibilité envolée, j'avais objecté et j'étais parti en service civil.

Au menu : des égos surdimensionnés en pagaille, la prise de conscience - un rien brutale - que l'action humanitaire est un marché sur lequel les différentes ONG se battent pour de la part de marché, et un boulot parfois fastidieux mais souvent complètement exaltant (comme disent les jeunes)(oui, je sais, c'est les faux vieux comme moi qui disent tout le temps "comme disent les jeunes"). J'ai parlé de torture avec des journalistes, beaucoup. J'ai parlé de la Chine, souvent (et tiens, 8 ans plus tard le sujet est toujours autant d'actualité).

Et enfin, j'ai beaucoup parlé de la peine de mort. J'ai parlé de la peine de mort à des gens chez Radio France et chez Libération. J'ai parlé de la peine de mort à des bénévoles. J'ai parlé de la peine de mort un dimanche matin dans une émission que Princess Aniès animait sur Génération. Et quand parler ne suffisait plus, j'ai léché des enveloppes par paquet de 100, je suis allé m'allonger avec une centaine de mes camarades, tout de noir vêtu, devant le consulat des Etats-Unis à Paris. J'ai milité longuement. J'ai parlé de Tookie, un peu, de Mumia - si emblématique - beaucoup.

Et puis ... Et puis ma vie a changé. progressivement, sans coup férir. J'ai changé de carrière - presque une fois par an sur les 10 dernières années. J'ai fait d'autres choses. Et un peu comme j'ai petit à petit arrêté de jouer au foot, j'ai aussi arrêté de militer. Pour être franc : de manière beaucoup plus nette et radicale que pour le foot. Plus ou moins consciemment, j'ai revu mes engagements.

Et voilà que hier il y a quelques jours, une cour d'appel fédérale américaine a commué la sentence de Mumia Abu-Jamal. Pendant ce temps, je planchais sur une recommandation de navigation plus ergonomique et plus efficace pour un de mes clients, et sur le positionnement globale de mon agence web. Je relisais des articles à paraître sur la blogo et j'insultais un commentateur qui m'avait agacé. Alors que je rentre tard et qu'on m'apprend la nouvelle, voilà que remonte tout doucement la nostalgie des jours de lutte. Une lutte que j'ai désertée mais qui atteint sans moi l'un de ses objectifs, tant d'années plus tard. Un objectif tout relatif : Mumia n'est toujours pas innocent, même s'il a au moins quitté le couloir de la mort.

Ce soir, je pense à Fabrice, à Nath, à Cathy, à Cyril, à la dame revêche du standard et à l'institutrice à la retraite - j'ai honte d'avoir oublié son nom, et je peux à peine me rappeler de son visage - qui s'occupait des campagnes "PdM" comme on disait. Avec un sérieux pincement au coeur.

Bob Dylan : Hurricane
[from Desire]

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