"Même à la lanterne magique, il ne faut pas se faire de cinéma: la plupart des liens solides se nouent au-delà de l'intellect et ne s'expriment que rarement dans les livres, mais dans les tatouages qu'on peut voir à la plage ou à la morgue, dans deux mains qui serrent une épaule sur un quai de gare et garderont - trop longtemps peut-être - cette chaleur et cette élasticité dans les doigts, dans des cartes écrites par des militaires et si mal adressées qu'elles arrivent par erreur chez de vieilles folles auxquelles on n'avait jamais dit des choses si tendres, dans le silence de deux visages qui s'enfoncent au tréfonds de l'oreiller comme s'ils voulaient y disparaître, dans ce désir si rarement comblé qu'ont les mourants de trouver le bout de l'écheveau et quelque chose à dire, dans la fenêtre qu'on ouvre ensuite, dans la tête d'un enfant qui fond en larmes, perdu dans la rumeur d'une langue étrangère."C'est du Bouvier, évidemment. C'est dans la Chronique Japonaise.
Je suis tombé sur ça :
"J'étais allongé, il me suffisait de toucher du bout du doigt le bout d'un sein, j'avais cette connaissance qui vous vient comme tombe la pluie, j'avais compris que l'amour n'est pas un don, mais un vœu. Seuls les courageux peuvent s'y tenir au-delà d'une courte période. Je pensais alors à Déborah, à toutes les nuits d'autrefois, lorsque j'étais étendu près d'elle avec un amour qui n'étais pas celui-là, alors que j'en avais déjà soupçonné l'existence, avec elle ou avec d'autres, des filles avec qui j'avais passé la nuit sans jamais les revoir - car nos trains partaient chacun d'un côté - des femmes que j'avais connues pendant des mois mais où j'avais trouvé cet amour certaines nuits au fond d'un tonneau de whisky. C'était toujours le même, l'amour est toujours l'amour, on peut le trouver avec n'importe qui, n'importe où. Mais on ne peut jamais le garder. Sauf si vous êtes prêts à mourir pour lui, cher ami."
C'est du Mailer, évidemment. C'est dans Un rêve américain.
Et là je me demande si dans tout ce que j'ai pu écrire au cours des années, il y a ne serait-ce qu'une phrase qui aurait eu pour quelqu'un - quelque part - un effet comparable au trouble que provoquent ces deux citations chez moi. Je me contenterais même d'un effet juste similaire, vaguement apparenté, en plus petit, en modèle réduit (je ne suis pas
Quelque chose qui fait dire au lecteur que le tourbillon des vents contraires est le lot commun de chacun. Qui lui rappelle que d'autres l'ont vécu, expérimenté, traversé. Et que certains ont même su trouver des mots qui entrent étrangement en résonance avec ce que nous sommes incapables d'articuler.
Et oui, Bouvier, c'est décidément une obsession.
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Photo par Sskizo
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Rien à voir, mais quelqu'un peut dire à la flèche d'or que c'est quand même significativement primordial (sic) quand on organise des manifestations musicales de ne pas employer des sourds comme ingéson ? Les concerts de la soirée d'hier étaient désastreux malgré une affiche plus qu'alléchante.
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Charles Villeneuve, je le dis comme je le pense et je te tutoie comme la maréchaussée tutoie les jeunes qui ont le malheur de porter une casquette, tu n'es qu'une pauvre merde.
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