February 16, 2005

un peu d'acid dans votre jazz ? [#1]

Acid Jazz. La locution apparait en Angleterre dans la première moitié des années 90s, mais ce qu'elle désigne demeure assez flou. A l'origine le nom d'un label, elle est vite généralisée pour tenter de désigner un nouveau courant musical.

Sur la multitude de compilations qui fleurissent à cette époque, on trouve un hip-hop léger et très imprégné de jazz, dans la foulée de la reprise du "Cantaloop Island" d'Herbie Hancock par US3. La spécificité de ce rap là, par rapport au reste, s'avère pourtant problématique, puisque les producteurs hip-hop ne l'ont pas attendu pour s'adonner à des visites plus ou moins éclairées du patrimoine musical afro-américain, et donc du jazz. L'acid jazz serait donc la rencontre du hip-hop et du jazz, soit deux éléments qui n'auront pas attendus son émergence pour se rencontrer et qui continueront de se télescoper bien après sa disparition ...

On retrouve également dans le lot, outre l'inévitable Jamiroquai, à l'époque encore fringuant, pas trop mal embouché et relativement inspiré (ahhhh la basse de Blow Your Mind qui rebondissait à n'en plus finir ...), un rock résolument orienté vers le funk et aux harmonies là encore imprégnées de jazz, qui n'a cependant pas grand chose à voir avec le rap sus-cité.

Bref. Peu de sens, si ce n'est, peut-être, celui d'avoir voulu capter le son d'une époque. Reste que figure dans cette liste une bonne quantité de petites perles. Inventaire

1. Urban Species



1994. En France, l'étendard de ce mouvement est clairement le groupe Urban Species, qui trouve ici une popularité qu'il ne rencontrera jamais ailleurs. La raison : la présence sur "Listen", extrait du premier album du groupe, d'un MC Solaar alors aussi populaire que crédible et justement plutôt en verve lorsqu'il chante la balle qui déchire les ailes de la palombe.

Rassemblé autour de son MC/compositeur Mintos, le groupe alterne entre groove festif et des ballades jazzy qui feront son succès. Le rap y est posé, réfléchi et tranquille. Ici on parle de femme et pas vraiment de hargne. Même lorsque le sujet se fait plus politique et revendicatif, on reste dans un registre qui tient plus du salon que du meeting.

Le second album du groupe, "Blanket", nous est parvenu après 4 années de silence. La recette n'a que peu varié, mais le propos s'est enrichi de la présence de nombreux invités, en particulier une collection de MCs venus de la scène londonienne, dont certains membres de Black Twang, qui lui donne plus d'apreté.

Les singles d'Urban Species ont souvent eu une utilisation publicitaire, que ce soit pour Yves Rocher ou des tampons. Derrière ces "tubes" évidents se profilent d'autres compositions pas moins émouvantes. Sur "Changing of the Guard", la voix profonde de Terry nous emmène en promenade, alors que l'ineffable mélancolie de "Blanket", sussurée par la diva de l'underground londonien, Imogen Heap, nous incite à rester sous la couette, à l'abri de la brume, bercé par des harmonies doucereuses.

Urban Species feat. Terry Callier - The Changing Of The Guard
[from "Blanket"]

Urban Species feat. Imogen Heap - Blanket
[from "Blanket"]

[Buy]

Dans le prochain épisode : Mother Earth et Corduroy

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